Ce soir, je viens de visionner un film sur les émois amoureux de l’adolescence. J’ai compris alors que ces émois me sont totalement étrangers ; et me le seront toujours. La seule fois où j’aurais pu faire basculer mon existence dans une idylle illusoire, j’ai fait marche arrière ; terrassé par la peur de mes émotions. Aujourd’hui, quand je regarde mon reflet, défraîchi par les agressions répétées de la vie dans un miroir, je n’y vois qu’une coquille vide. L’éclat de mes yeux s’est éteint à tout jamais pour ne laisser que des prunelles emplies de ténèbres insondables en dépit de leur clarté. Je survis tel un spectre, dans une société qui me dépasse, entouré de bibelots insipides. Je souris pour le lien social, mais aucune joie ne se dissimule derrière ce rictus artificiel. Je réalise que l’émoi des amours innocents m’est étranger. Le désir de l’autre, au-delà du corps, appartient à un univers éloigné et mystérieux. Les étreintes réconfortantes ne demeurent que des fantasmes. J’erre ainsi sans essence, sans substance, et je prends conscience que je ne suis qu’une enveloppe physique, creuse, vide, morte…
